Espaces contraints, espaces subis ?
Les territoires préhistoriques à l’épreuve du milieu physique.
Depuis le dernier CPF Auvergne en 1969, les travaux archéologiques ont profondément renouvelé la connaissance régionale. Le constat d’une Auvergne tout à la fois centre créateur et terre de marges reste toutefois largement partagé : si le déterminisme environnemental a progressivement cédé la place à de nouvelles formes d’écologie culturelle, plus conformes aux réalités géographiques des espaces envisagés, c’est désormais sous le prisme des contraintes du milieu physique et de ses usages que s’appréhende son statut de périphérie de peuplement. Cet exemple, presque archétypique, offre l’opportunité de s’interroger plus largement, et dans des contextes multiples, sur les façons particulières qu’ont les groupes humains « d’être » aux milieux et aux espaces, qu’ils soient occupés, exploités ou simplement parcourus.
Une telle approche suppose au préalable de définir précisément ce qu’est un espace contraint. Par-delà des impressions souvent trompeuses, il s’agit en réalité d’apprécier quelles réalités environnementales, sociales ou culturelles cette notion recouvre. En géographie humaine, les espaces à fortes contraintes naturelles impliquent une confrontation à des conditions climatiques (températures, précipitations, etc.) ou physiques (relief, isolement, etc.) extrêmes dont les conséquences sont fondamentales sur les sociétés humaines en termes de mobilité, d’implantation, d’accès aux ressources ou encore d’exploitation agropastorale des territoires.
Pour saisir les dynamiques d’occupation de ces espaces, il convient donc d’en circonscrire les exigences, mais aussi les potentialités, ces différentes réalités devant être considérées non comme des freins au développement, mais plutôt comme de puissants « moteurs » évolutifs permettant d’intégrer les limites inhérentes au milieu, ses stimuli et les diverses manières d’y répondre. De ce point de vue, la montagne, entendue comme espace contraint, offre souvent une réponse plus rapide et plus intense aux variations des paramètres environnementaux et aux ruptures d’équilibre climatique. En cela, elle constitue – à l’instar d’autres espaces aux caractéristiques originales, comme les littoraux, les régions circumpolaires ou de hautes latitudes (pergélisol), les domaines insulaires, les bassins sédimentaires ou les fonds de vallées marécageux, etc. – un laboratoire privilégié pour saisir les modalités et les rythmes des peuplements préhistoriques.
Conscients de la diversité des problématiques qu’englobe le thème de ce congrès, les sessions programmées abordent ces questions de manière transversale, d’un point de vue tant chronologique que géographique ou thématique. Les sujets historiographiques, mettant l’accent sur les constructions théoriques des espaces contraints, leurs enjeux historiques récents et l’influence des modèles contemporains sur leur définition. Ils permettront d’aborder de manière critique la réalité des territoires préhistoriques, dans une dialectique renouvelée avec la géographie humaine et ses méthodes. Priorité sera par ailleurs donnée aux études de cas, dans une perspective de longue durée, à travers l’étude d’espaces contraints ou supposés tels, aux caractéristiques spécifiques. Les sessions ouvriront ainsi sur des communications mettant largement l’accent sur les stratégies d’adaptation des sociétés humaines aux propriétés du milieu et sur la manière de les appréhender dans le registre archéologique.
